Septième enfant – et deuxième garçon – d’une grande fratrie, Chen Thienhong revient après une très longue absence sur les terres de son enfance, un patelin du cœur reculé de Taïwan, alors même que la Fête des fantômes y bat son plein. Par sa présence, il va bousculer les esprits de sa famille, jusqu’à en réveiller les fantômes, et révéler leurs secrets les plus profondément enfouis.
Le texte, une ample et sinueuse tapisserie, se tisse de fil en aiguille, au rythme des prises de paroles de chacun des membres de la famille que Chen Thienhong se doit d’affronter. On entendra ainsi le passé des cinq sœurs, que leur sexe faible et réprimé dans cette culture ô combien patriarcale a respectivement soumises à une violence inexorable, mais aussi celui – pathétique – du premier frère, de la mère, et même la voix du père, mort depuis plusieurs années et dont le point de vue presque omniscient éclairera la toile à plusieurs reprises.
Ghost Town : il y est fait référence à une ville fantôme du centre de l’île, dans une région délabrée, à la fois embourbée dans son conservatisme et envieuse de la modernité clinquante des villes côtières. Un endroit frappé de plein fouet par l’exode de sa jeunesse instruite et la décrépitude de ses activités, mais qui fête annuellement ses fantômes en grande pompe.
Ghost Town : c’est un roman choral virtuose – le premier fort bien traduit en français de cet écrivain à la renommée importante dans ses contrées – dont la charpente est construite solidement, d’une plume qui sait y faire. C’est un texte éminemment littéraire qui se déplie, morceau par morceau, invite le lecteur à explorer ses méandres et s’élabore sous ses yeux jusqu’à la dernière page.
© Le Seuil, 2023.